Négociations UE-Etats-Unis : Bruxelles ne doit pas brader les règles sanitaires et agricoles
Jeudi 20 février 2020
Plus de 100 ONG, syndicats et associations, dont 22 françaises, interpellent les gouvernements et parlementaires de l’UE sur les négociations en
cours entre l’Union européenne et les États-Unis : la Commission est-elle sur le point de brader les réglementations sanitaires et agricoles européennes, comme l’a laissé entendre son
commissaire au commerce Phil Hogan, pour satisfaire les intérêts des États-Unis ? Alors que le salon de l’agriculture ouvre ses portes, Emmanuel Macron, qui s’était opposé sans succès à
l’ouverture de ces négociations, devrait expliciter publiquement comment il entend repousser cette menace.
Lors du Conseil de l’UE du 15 avril 2019, en pleine campagne des Européennes, la France a opportunément voté NON à l’ouverture de
négociations entre l’UE et les États-Unis. Emmanuel Macron avait fait savoir qu’il fallait « défendre une Europe exemplaire pour le climat » et ne pas négocier « avec les
États-Unis qui se placent en dehors de l’Accord de Paris ». N’ayant pas construit de minorité de blocage, la France n’a pu empêcher que deux mandats de négociation soient votés à la
majorité qualifiée, l’un portant sur l’élimination des droits de douane sur les produits industriels et l’autre en vue d’un accord sur "l’évaluation de la conformité" (procédures et
organismes de certification des produits étrangers) [1].
Jusqu’il y a peu, la Commission européenne avait toujours écarté la possibilité que ces négociations portent sur l’agriculture et
l’alimentation, malgré les velléités des négociateurs américains. Le nouveau commissaire européen au commerce, Phil Hogan, a visiblement fait volte-face, déclarant qu’une « longue liste
d’obstacles réglementaires dans le domaine de l’agriculture » pourraient être levés [2]. Quand on sait que les États-Unis souhaitent obtenir des assouplissements sur les
normes interdisant l’importation en Europe de viande produite avec des hormones, rincée à l’acide ou au chlore, ou sur les résidus de pesticides dans les denrées alimentaires, il y a de quoi
être inquiet.
Raison pour laquelle plus de 100 ONG, syndicats et associations appellent « les gouvernements et les parlementaires de l’UE à pousser la
Commission européenne à modifier sa ligne de conduite », précisant que Bruxelles doit clairement réaffirmer que « nos niveaux de protection de la santé publique et de
l’environnement ne doivent pas être bradés » pour satisfaire les intérêts américains et préserver l’industrie automobile européenne d’éventuelles rétorsions tarifaires
américaines.
En France, alors que le salon de l’agriculture ouvre ce samedi 22 février, Emmanuel Macron, qui n’a pas su empêcher l’ouverture de ces
négociations commerciales entre l’UE et les États-Unis, Didier Guillaume et Jean-Baptiste Lemoyne, respectivement ministre de l’Agriculture et secrétaire d’État auprès du ministre de l’Europe
et des Affaires étrangères, doivent expliquer publiquement comment ils entendent s’y prendre pour écarter cette menace très sérieuse qui pèse sur les normes sanitaires et agricoles qui
protègent les consommateurs et le système agricole français.
Nous appelons le gouvernement français à faire preuve d’une grande vigilance en la matière puisque la Commission a déjà, sans aucun mandat du
Conseil de l’UE, considérablement favorisé l’augmentation exponentielle de soja et de gaz naturel liquéfié importés depuis les États-Unis (respectivement + 96% entre juillet 2018 et juin
2019, et + 593 % entre juillet 2018 et décembre 2019) [3]. Il est urgent que la Commission européenne et
les États membres considèrent que nos niveaux de protection sanitaires et environnementales ne sont pas à brader, sous quelque motif que ce soit.
68 organisations demandent au parlement européen de ne pas ratifier les nouveaux accords de commerce et d'investissement notamment celui entre l'UE et le Vietnam
Lire la déclaration des 68 organisations dont ATTAC france
Après un premier vote à l’Assemblée nationale, avec courte majorité le 23 juillet 2019, sur le projet de loi autorisant la ratification du
CETA, ce sont maintenant les sénatrices et les sénateurs qui devront s’exprimer pour adopter ou rejeter le texte dans les prochains mois. La faible majorité des votes à l’Assemblée nationale
témoigne du malaise des élu·e·s vis-à-vis d’un accord de commerce et d’investissement qui a été l’objet de nombreuses approximations, omissions et contre-vérités. Rétablissons la vérité en 10
points.
Lors de la séquence du premier vote sur la ratification du CETA en juillet à l’Assemblée nationale, le gouvernement a fait preuve d’approximation,
d’omissions, voire de contre-vérités. Dans ce document, nous revenons sur dix d’entre elles, afin de les analyser, et d’en revenir aux faits.
1. Le CETA, c’est bon pour la croissance et l’économie françaises ?
2. « Tout produit interdit sur le marché européen l’est aussi à l’importation »
3. « Les filières agricoles ne seront pas déstabilisées par les importations canadiennes »
4. « Les normes européennes sont protégées » et le CETA permettrait une « harmonisation par le haut »
5. Le Canada serait un partenaire de confiance aux normes proches des nôtres
6. « L’impact du CETA sur le réchauffement climatique sera minime »
7. Le CETA, un levier pour forcer le Canada à respecter ses engagements climatiques ?
8. Le veto climatique protégerait l’intérêt général ?
9. Il n’y aurait plus de justice d’exception favorable aux multinationales ?
10. « Ne pas signer le CETA c’est fermer les frontières et nous isoler nous-mêmes »
20 décembre 2019
Le point sur les traités de libre échange en cours de négociation ou de ratification fait par Frédéric Viale
Derrière le CETA, une quinzaine d'accords de libre échange se profilent mais trois arrivent immédiatement. Un quatrième, quoique n'étant pas un
ALE vise à les faciliter grandement.
L'accord
de libre-échange avec le JaponJEFTAest en instance de signature au Conseil européen ; la conclusion politique de l'accord
UE-Mexique etcelle avec le Mercosur sont possibles dés le premier
semestre, seule la situation politique bousculée dans les pays du Mercosur pouvant éventuellementreculer l'échéance. Par ailleurs, la Commission vient d'obtenir du Conseil européen le mandat de négocier un accord multilatéral visant à instaurer
une« Cour multilatérale d'investissement » (la MIC)
Le point commun des accords de libre-échange est que leur champ d'application ne se limite pas à réduire les droits de douane. Comme le TTIP/TAFTA
et le CETA, ils appartiennent à la nouvelle génération des accords de libre-échange ayant vocation à supprimer les obstacles « non tarifaires », c'est à dire toutes les réglementations, y compris
celles relatives à la protection de l'environnement, de la santé et des consommateurs qui ont le don de déranger les « investisseurs » (cad les entreprises transnationales). Ils sont
généralement dans l'ignorance complète des droits humains des travailleurs salariés ou paysans.
Alors que la Commission avait promis qu'elle ne réitérerait plus sa façon de négocier dans le plus grand secret et que le gouvernement français
avait juré ses grands dieux qu'il y veillerait, les accords en question arrivent sans que cette promesse n'ait été respectée.
Ces projets d'accord limiteraient le droit des gouvernements à réglementer dans l'intérêt public général : la protection de la santé publique, les
droits des consommateurs ou l'environnement sont sacrifiés. Le principe de précaution est absent ou, au mieux, relégué au second plan par les approches préférant l'évaluation scientifique des
risques après coup et l'analyse économique coûts-bénéfices, approches favorisées par l'OMC puis par le CETA. Dans ces accords, le principe de précaution est rarement mentionné et quand il
apparaît c'est dans les chapitres sur le développement durable et la coopération réglementaire, points qui ne sont pas assortis de sanctions.
JEFTA – Accord UE Japon
Le JEFTA est un accord qui a de nombreux points communs avec le CETA : libéralisation du commerce, suppression des obstacles au commerce, accès au
marché, arbitrage, coopération réglementaire.
Concernant la libéralisation, les droits de douanes sont déjà très bas avec le Japon, il est prévu qu'ils disparaissent pratiquement à terme.
Les réductions mutuelles de droits de douane seront mises en place dans les 15 prochaines années. Le Japon éliminera 86% de ces droits de douane lorsque l’accord rentrera en application. Aussi
bien au Japon qu'en UE, l'ouverture du marché agricole aura des effets déstabilisateurs.
Le JEFTA ne contient pas à l’heure actuelle de tribunal arbitral de type ISDS (ou mécanisme d'arbitrage). il contient cependant un organe de
règlement de différends investisseurs contre États similaire à celui de l’ORD de l’OMC où ce ne sont que les États (en l’occurrence ceux soutenant les investisseurs) qui peuvent attaquer un autre
État.
Le Japon tient à obtenir un mécanisme d'arbitrage qui aille plus loin que celui prévu par le CETA : la notion de « traitement juste et
équitable » y serait encore plus dangereuse que dans le CETA, portant des ambiguïtés plus importantes. Toutefois, la Commission envisage actuellement la possibilité de négocier et de
ratifier de futurs accords sur la protection des investissements de manière séparée. Cela rendrait possible la finalisation et la ratification accélérée de l'accord, car il ne serait plus
indispensable d'obtenir au préalable l'approbation de tous les parlements nationaux des États membres.
Le mécanisme de coopération réglementaire aurait des conséquences non négligeables : comme l'UE qui a autorisé plus de 60 OGM, le Japon a
homologué 105 OGM pour la recherche scientifique, 172 pour l'alimentation humaine, 162 pour l'alimentation animale et 11 plantes ornementales.
Le JEFTA, tout comme le CETA, passe sous silence le principe de précaution dans ses chapitres sur les obstacles techniques au commerce (OTC) et les
mesures sanitaires et phytosanitaires (SPS) qui traitent de la santé humaine et animale.
Le chapitre sur la coopération réglementaire met en place des comités, ce qui va permettre que l'harmonisation réglementaire aille loin et
profondément dans les réglementations existantes et à venir. La liste de ces comités, où les lobbies d'affaire ont une place prépondérante, est impressionnante : le comité sur le commerce
des biens, celui sur les services, l'investissement, la gouvernance des entreprises et le e-commerce, le comité sur les marchés publics, le comité sur le commerce et le développement durable, le
comité sur les mesures sanitaires et phytosanitaires, le comité sur les obstacles techniques au commerce, le comité sur les questions liées aux douanes et sur les règles d'origine et celui sur la
propriété intellectuelle.
Mercosur
Il s'agit d'un accord de libéralisation qui porte essentiellement sur l'agriculture, les services, la protection intellectuelle, la facilitation du
commerce.
Cet accord ne porte pas de mécanisme d'arbitrage tel celui du CETA. Toutefois, il faut ne pas oublier que les nombreux traités bilatéraux
d'investissement (TBI) ont été conclus entre les pays du Mercosur et les États membres de l'UE et qu'ils autorisent un mécanisme de règlement des différends entre investisseurs et États.
L'Argentine a signé des TBI avec 21 États membres de l'UE, l'Uruguay avec 14 d'entre eux, le Paraguay également avec 14 et le Brésil avec 10. La République fédérale d'Allemagne a elle-même conclu
des TBI avec les quatre pays membres du Mercosur (connus sous le nom d'accords de promotion et de protection des investissements).
Concernant l'agriculture, 96 pour cent du soja utilisé dans l'UE est importé et la majorité de ces importations provient du Mercosur, en premier
lieu de l'Argentine et du Brésil, et dans une moindre mesure du Paraguay et de l'Uruguay. Or, le modèle de culture du soja hautement industrialisé dans les pays du Mercosur fait peser une menace
grave sur l'environnement et la santé humaine. Presque 100 pour cent des terres produisant du soja en Argentine et environ 96 pour cent de ces terres au Brésil sont ensemencées de soja
génétiquement modifié. Avec le développement de la culture du soja dans les pays du Mercosur, l'utilisation du glyphosate a augmenté de manière exponentielle, ce qui a eu de lourdes conséquences
sur la santé et la biodiversité.
Les quotas d'importation de l'UE menacent d'être revus à la hausse. Tout comme pour le soja, les méthodes utilisées en Amérique du sud pour la
production de maïs, de blé et de viande sont très intensives et présentent donc aussi des risques pour la protection de l'environnement et des consommateurs. Par ailleurs, l'augmentation de
l'exportation vers l'UE de l'isoglucose (également connu sous l'appellation de sirop de glucosefructose ou sirop de maïs à haute teneur en fructose) est négociée. Produit à partir de l'amidon du
maïs ou du blé, l'isoglucose sert à l'industrie agroalimentaire comme substitut peu onéreux du sucre de betterave. L'accord avec le Mercosur pourrait contribuer à réduire les coûts de production
du sucre et de l'isoglucose dans l'UE, ce qui encouragerait par la suite leur plus grande utilisation par le secteur agroalimentaire.
De plus, si les demandes du Mercosur relatives aux quotas de viande sont acceptées, ses exportations de viande à destination de l'UE pourraient
augmenter de manière significative. La production massive de viande est néfaste pour l'environnement, les consommateurs et la santé publique. Il est très clair que l'UE a entendu troquer la
pérennité de ses filières de production agricole à l'obtention de l'accès aux marchés publics locaux en faveur des entreprises de services, celles-ci étant désormais autorisées à intervenir au
niveau national mais surtout local.
Par ailleurs, l'accord entre l'UE et le Mercosur comprend également des dispositions relatives aux obstacles techniques au commerce (OTC) et aux
mesures sanitaires et phytosanitaires (SPS), ce qui aurait pour conséquence de saper le principe de précaution de l'UE. A sa place, l'approche coûts/avantage serait privilégiée pour les
réglementations futures ayant un impact sur le commerce. Si la coopération réglementaire en tant que telle n'est pas prévue dans cet accord, celle-ci y est introduite subrepticement par certains
articles comme l'article 3 du chapitre sur les OTC qui prévoit que les parties s'engagent à négocier des initiatives dans le domaine des normes techniques pour faciliter le commerce.
Les droits humains ne sont pas pris en compte directement dans cet accord, au moment ou certains pays du Mercosur comme le Brésil et l'Argentine
connaissent un tournant autoritaire.
Il apparaît néanmoins que deux au moins des pays majeurs du Mercosur se trouvent dans une situation politique instable alors qu'un troisième entre
en période d'élections. L'Argentine, avec le président néo/ultra-libéral Macri connaît des résistances internes et des violences de la part du gouvernement. Le Brésil est à la veille d'élections
présidentielles qui peuvent porter Lulla à la présidence dans un contexte dangereux (assassinats politiques, institutions politiques crispées, président sortant putchiste et corrompu). Les
négociations avancent peu et dans un tel contexte, elles peuvent être rapidement bloquées. Rien n'est certain, ni dans un sens ni dans l'autre.
Accord UE-Mexique
Cet accord se présente comme un accord de « modernisation » d'un accord déjà existant.
L'objectif principal du Mexique est de diversifier ses marchés à l'exportation. Actuellement 80 pour cent des exportations mexicaines sont
destinées au États-Unis d'Amérique contre seulement 5 pour cent pour l'UE.
Les droits de douanes industriels entre les deux parties ont déjà presque totalement disparu, tandis qu'environ 65 pour cent des importations
agricoles sont détaxées.
Le mécanisme d'arbitrage prévu ressemble à l'ICS du CETA. Par ailleurs, le Mexique et l'UE se sont engagés en faveur d'un traité portant ce
qu'on appelle dans le jargon un ISDS global, cad le mécanisme d'arbitrage généralisé pour la négociation duquel la Commission vient d'obtenir un mandat (voir dernier point de mon message).
Les dispositions de l'accord portent sur l'interdiction des OTC, ce qui aurait un impact redoutable concernant certaines utilisations de produits
chimiques interdits dans l'UE mais autorisés au Mexique comme des insecticides massivement utilisés dans l'agriculture mexicaine gavées de produits Bayer et Monsento. De même le principe de
précaution est attaqué par les règles prévues concernant le domaine sanitaire et phytosanitaire. Par ailleurs, un mécanisme de coopération réglementaire est prévu, organisé en comités, qui
a vocation à produire une course vers le fond de la protection des réglementations du consommateur et de l'environnement.
Au Mexique, les violations des droits humains dans le secteur agroalimentaire sont fréquentes et répandues, découlant notamment des conflits
liés à des propriétés foncières collectives et des territoires autochtones. Pourtant, rien n'indique que cet accord contiendra un chapitre sur le commerce et le développement durable assorti de
sanctions ou une clause plus efficace en matière de droits humains.
Quoiqu'il en soit, la clause relative aux droits humains de l'accord global avec le Mexique entré en vigueur en 2000 a été jusqu'ici parfaitement
inefficace. Malgré les nombreuses violations avérées des droits humains au Mexique, l'UE persiste à ignorer toute demande d'activation de cette clause, comme si les violences particulièrement
atroces et répétées au Mexique ne suffisaient pas. Rien ne permet de dire que l'accord modernisé prévoit un mécanisme moins inefficace.
L'accord portant une Cour multilatérale sur l'investissement (la MIC).
Le Conseil de l’UE a donné mandat à la Commission le mardi 20 mars 2018 pour
entamer des négociations sur une Cour multilatérale des investissements.
Il s'agit de la concrétisation d'une idée de la Commission européenne consistant à négocier avec le plus d’États possible une Cour multilatérale
chargée spécifiquement de protéger les investissements, exactement selon les mêmes principes que nous dénonçons dans les accords de libre-échange en cours, dont le CETA. En effet, cette
« cour » sera chargée de servir de Cerbère pour que les États ne prennent pas de réglementations qui pourraient être contraires aux intérêts « légitimes » des
entreprises.
Cette « cour » aurait pour la Commission deux avantages : outre de permettre d'installer un mécanisme permanent protégeant les
investisseurs au sens où la Commission l'entend (cad dans le sens de la restrictions des capacités d'actions des États), cela éviterait également d'avoir à négocier un chapitre spécial dans
chaque accord de libre-échange pour installer un mécanisme d'arbitrage. Comme, par ailleurs, ce type de dispositif focalise les critiques des opinions publiques, la Commission se sentira plus
libre de négocier l'essentiel, des accords permettant plus de libéralisation du commerce.
De surcroît, les futurs accords de libre-échange en cours de négociation, seront plus facilement ratifiés puisque la présence de ce mécanisme
d'arbitrage dans l'accord nécessite qu'il soit ratifié au niveau national (ce qui complique l'opération). Dés lors que l'arbitrage est absent de l'accord considéré, la ratification ne devra être
obtenue qu'au niveau du Parlement européen – ce qui, convenons-en, est plus commode pour la Commission.
Ainsi, la Commission et les gouvernements jettent leurs promesses de transparence et de participation des populations aux orties.
Quatre problèmes majeurs ont pu être relevés sur le fond :
1. Les droits exorbitants accordés aux investisseurs étrangers dans le cadre de nombreux accords d'investissements, y compris ceux portant sur le
« traitement juste et équitable » et « l'expropriation indirecte », sont maintenus. Les investisseurs pourront donc toujours disposer d'instruments juridiques pour exiger des
dizaines de millions d'euros de compensations pour des mesures légitimes, adoptées démocratiquement, en faveur des travailleurs, de la santé publique ou de l'environnement – y compris quand ces
mesures sont conformes aux législations nationales ou européennes.
2. Les investisseurs étrangers ne seraient toujours pas tenus d'épuiser les voies de recours nationales et de respecter les juridictions nationales
et européennes avant de porter plainte devant la Cour internationale. Cette pratique diverge complètement avec le droit international coutumier et le droit international relatif aux droits de
l'Homme, dans lesquels les plaignants doivent d'abord se tourner vers les juridictions nationales à moins qu'ils ne puissent démontrer qu'un procès local serait inutile. En résumé, alors que les
citoyens ordinaires sont soumis à des procédures longues, les investisseurs étrangers (qui disposent pourtant de ressources non négligeables) sont autorisés à contourner les juridictions
nationales.
3. Seuls les investisseurs étrangers auraient accès à la Cour multilatérale. Ce système est favorable aux entreprises transnationales
4. Aucune obligation pour les investisseurs de se conformer aux droits national et international, de respecter les droits humains ou de s'abstenir
de détruire l'environnement. Les investisseurs ne seraient pas contraints légalement par un devoir de vigilance en matière de respect des droits humains. Et l'accès à la Cour ne serait pas refusé
à ceux qui violent les droits des travailleurs, pratiquent la corruption ou la fraude fiscale ou polluent l'environnement.
La lutte contre le CETA n'est pas terminée !
Lalutte contre le CETA, le traité de libre échange entre le Canada et l'Union
Européenne, n'est pas terminée. Si une partie est bien entrée en application, il n'est pas ratifié notamment en France. Les députés vont avoir à se prononcer probablement après les mois d'été. Sa
ratification est loin d'être acquise. Des députés de tout bord se posent des questions. Il est temps de mettre un coup de pression afin qu'ils penchent du côté des opposants à ce traité néfaste
pour la démocratie, l'agriculture, l'environnement, nos législations et le climat.
Vous trouverez ci-dessous plusieurs documents
soit d'informatifs (Plan d'actions gouvernemental et sa critique, bilan d'étape de la mise en application provisoire),
soit que utilisables en les distribuant ou en écrivant à votre député( 4 pages, lettre à envoyer).
Les lettres sont des courriers spécifiques écrites par le collectif national stop CETA auquel participent de nombreux militants d'ATTAC. Compte-tenu
de la situation politique du Var, nous avons mis les courriers à adresser soit aux députés LREM soit aux députés LR.
Pour écrire à votre député, vous pouvez avoir son adresse en reproduisantle lien ci-dessous dans votre barre d'adresse :
Le Parlement européen vient de ratifier le CETA, avec 408 voix pour, 254 voix contre et 33 abstentions. La quasi totalité du groupe PPE, et
60 % du groupe social-démocrate ont constitué l’ossature de ce vote qui satisfera les « donneurs d’ordre » : les transnationales et leurs lobbys. Dès le 1er mars (à défaut le 1er avril) le CETA va donc entrer en application provisoire pour la plus grande partie de ses
dispositions.
Alors que pour « verrouiller » ce vote les tenants du traité, Commission européenne en tête, ont agité la nécessité de s’opposer au
populisme et à l’« isolationnisme » de Trump (lequel est quand même favorable aux accords de libre-échange à condition que ceux-ci soient bilatéraux), c’est finalement à l’exact
inverse que ce vote ouvre grand la voie. Ce sous deux angles :
sous l’angle économique, les 80 % d’entreprises de droit états-unien opérant en Europe et ayant des filiales au Canada ne rechigneront
sûrement pas à passer par ces filiales pour, via le CETA, faire valoir leurs intérêts ;
sous l’angle politique, les conséquences sur les populations, notamment en termes de droits sociaux, ne feront qu’amplifier la montée des
replis identitaires de toute nature, notamment la montée de l’extrême droite.
La ratification du CETA par le Parlement européen n’est en rien la fin de ce combat. Bien au contraire, nous devons redoubler d’effort pour
in fine mettre en échec le CETA :
la Commission européenne espère pouvoir s’appuyer sur l’arrêt imminent de la Cour de Justice de l’Union européenne, relatif à l’accord avec
Singapour (de contenu similaire au CETA), pour remettre en cause la mixité du CETA. Cela signifie que la Commission pourrait ainsi empêcher la ratification État membre par État membre,
qu’elle considère à hauts risques. Nous devons être prêts à exiger de l’actuel gouvernement, et des candidats aux élections, qu’ils indiquent que dans cette hypothèse la France
procéderait dans les plus brefs délais à un vote de non ratification du CETA ;
concernant le débat sur le fond : alors qu’il y a un fort risque que la ratification intervienne durant l’été dans le package des
premières lois qui feront suite à la mise en place d’un nouveau gouvernement, nous allons tout faire pour que la France refuse cette ratification. Un tel refus aurait un très gros impact
sur les opérations de ratification des autres États membres. Alors qu’une récente résolution de l’Assemblée nationale appelle à une consultation publique authentique avant cette
ratification, nous allons nous battre pour que le vote résulte d’un débat sérieux et impliquant véritablement les citoyens.
remise en cause du principe d’égalité (l’ICS privilégie les investisseurs étrangers),
transfert de compétences vers des organes (l’ICS, le forum de coopération réglementaire, comité mixte et spécialisés mis en place
par le CETA) qui ne se rattachent ni à l’ordre juridique de l’UE ni à celui des États membres,
remise en cause du principe de précaution actuellement inscrit dans la Constitution ;
mais également faire connaître les démarches juridiques lancées par d’autres pays de l’Union Européenne concernant des incompatibilités
constitutionnelles similaires :
la Belgique doit saisir prochainement la Cour de Justice de l’Union Européenne sur l’ICS (système juridictionnel de protection des
investissements),
l’Allemagne qui doit saisir la cour constitutionnelle allemande sur l’ensemble du traité ;
observer et dénoncer dés maintenant, aux niveaux nationaux et locaux, les premiers méfaits du CETA.
Non le CETA n’est pas encore passé ! Et nous allons tout faire pour mettreen
échec le néolibéralisme !
Conférence-débat organisée par ATTAC VAR avec Susan George
Le 7 octobre dernier, l'ICE auto-organisée a été remise à Mathias FEKL secrétaire d'Etat au Commerce
extérieur.
Cette ICE a été un véritable succès puisqu'elle a largement dépassée les critères que l'Union Européenne exige pour les ICE
qu'elle organise.
Plus de 3 millions de participants au lieu des 1 million exigé. 25 pays ayant dépassé leur quota en place des 7 demandés par
l'UE.
Ce succès doit nous permettre de continuer à mettre la pression sur un gouvernement français dont les positions manquent
clairement de clarté et sur une Union européenne qui essaye de nous enfumer avec ses propositions concernant le règlement des différents investisseurs - Etat.
Le Parlement européen renonce à se faire l'écho des citoyens
La plénière du Parlement européen a établi aujourd’hui son positionnement sur l’accord transatlantique,
dans une résolution très décevante pour tous les citoyens préoccupés par implications probables du futur traité.
Ignorant les 97 % d’avis opposés lors de la consultation de la
DG Commerce en 2014, les eurodéputés n’ont pas souhaité rejeter l’inclusion d’un mécanisme de règlement des différends Investisseurs-États dans l’accord futur,
alors que celui-ci donnera aux entreprises étrangères le droit exclusif d’attaquer des États. Le Président Schulz s’est assuré le soutien des élus libéraux et conservateurs en proposant
un compromis fait de formulations sibyllines, qui reviennent à accepter l’ISDS dès lors qu’il portera un autre nom.
Le texte comporte d’autres éléments problématiques : il cautionne le principe de la coopération
réglementaire, entérine la disparition de l’agriculture paysanne et la fin d’une alimentation de qualité. Il fait fi de l’impératif de lutte contre les dérèglements climatiques en
appelant à la libéralisation des échanges d’énergies fossiles. Il n’applique aucune précaution à la libéralisation des services financiers et soutient une approche de négociation hybride
concernant les services, la plus dangereuse. Le Parlement européen choisit donc aujourd’hui de s’inscrire à contre-courant d’une grande part de l’opinion publique européenne, et même
d’instances communautaires telles que le Conseil économique et social européen. Le Comité des Régions, pourtant contrôlé par des élus conservateurs, a aussi voté une résolution bien plus
critique, sans doute parce que les élus locaux comprennent qu’un traité sur ces bases restreindra leurs capacités d’action dans les territoires.
« Tout comme sur la gestion de la crise grecque, l’Union européenne
s’obstine dans une direction désavouée par les opinions publiques européenne » selon Jean-Michel Coulomb, du Collectif Stop TAFTA, présent actuellement à Strasbourg.
« De la même manière que l’administration Obama a usé d’astuces
techniques pour contourner la tendance majoritaire au Congrès américain sur les accords transpacifique et transatlantique il y a quelques semaines, le vote d’aujourd’hui à Strasbourg est
le résultat des pressions et d’obscures tractations entre MM Schulz et Lange et les promoteurs du traité. Sans optimisation de la technique parlementaire et sans
intrigues de couloir, le texte n’aurait pas été voté » analyse Amélie Canonne, du Collectif de campagne français.
Du reste un nombre croissant d’Européennes et d’Européens s’inquiète du futur traité. Déjà 2,3 millions
de citoyens européens ont signé l’Initiative Citoyenne Européenne (ICE) auto-organisée réclamant l’arrêt des négociations transatlantiques. Des mouvements
d’opposition émergent en Europe de l’Est, et les campagnes allemande, autrichienne, belge ou britannique continuent de monter en puissance.
Pour Michel Dubromel, également engagé dans la campagne française contre l’accord transatlantique, « Le vote du Parlement européen n’est pas la fin de l’Histoire pour nous, car la résolution n’a pas de caractère contraignant, et nous savons que la DG Commerce est surtout encline à suivre les injonctions des lobbies industriels et financiers. Nous allons donc poursuivre notre travail pour sensibiliser l’opinion mais
aussi les élus, et démontrer les méfaits de la politique commerciale conduite par l’UE ».
Le Collectif français Stop TAFTA-Non au grand marché transatlantique continuera donc à
s’inscrire dans les mobilisations européennes pour une Europe sociale et démocratique notamment lors des Marches européennes, début octobre, qui partiront d’Europe du Sud, passeront par
la France et convergeront à Bruxelles mi-octobre, en même temps que la cloture de l’ICE « Stop TTIP ».
Les eurodéputés s'allient pour soutenir les intérêts du business
Ce jeudi 28 mai, la Commission Commerce international du Parlement européen (INTA)
a adopté un texte désastreux pour les peuples et l’environnement.
Elle s’est prononcée sur le projet de résolution du député B. Lange concernant
l’accord transatlantique UE-États-Unis (TAFTA). Au terme de débats complexes, les élus du groupe social-démocrate ont pour l’essentiel choisi de se ranger aux côtés des groupes
conservateurs pour défendre un texte fort éloigné des attentes des citoyens.
C’est l’arbitrage d’investissement qui a surplombé les débats. Quatre versions
possibles du passage sur l’arbitrage d’investissement étaient proposées au vote, dont deux, soumises respectivement par le président Lange lui-même et par les groupes conservateurs,
soutenaient une réforme vague et insuffisante, sans remettre en cause le mécanisme ISDS.
Et c’est cette formulation qui a remporté la majorité, avec le soutien de
nombreuses voix social-démocrates, en contradiction complète avec les précédentes prises de position du groupe S&D. Au cours des derniers jours, la position des sociaux-démocrates sur
l’ ISDS a été affaiblie de manière répétée, jusqu’à ne plus exprimer le moindre rejet des privilèges accordés aux investisseurs.
Les membres d’ INTA, y compris presque tous les sociaux-démocrates, ont donc
préféré l’adoption d’un texte désastreux qui ne tient presqu’ aucun compte des demandes de l’opinion publique. Le texte voté marque de plus le choix social-démocrate de s’allier avec
l’actuelle Commission européenne plutôt qu’emboîter le pas aux citoyens et défendre l’intérêt général contre les privilèges des investisseurs.
Sur d’autres sujets, des amendements très contestables ont été votés conjointement
par les sociaux démocrates et la droite [1] sur les services, l’énergie ou encore la propriété intellectuelle, entre autres.
La « grande coalition » entre la majorité des sociaux-démocrates et les conservateurs appelle ainsi à la totale libéralisation du commerce des énergies fossiles entre l’UE et les
États-Unis et privilégie le mode de négociation le plus risqué sur les services.
C’est une déception majeure pour tous les observateurs de la société civile. Ce
vote a d’ailleurs été salué comme une avancée par Business Europe, le lobby des plus grandes multinationales européennes.
Le vote de la résolution Lange en plénière aura lieu le 10 juin. D’ici là les
groupes politiques pourront reformuler des amendements.
Mais à moins d’être profondément remanié, le texte proposé à la plénière par le
comité INTA devra selon nous être totalement rejeté, sans quoi le Parlement européen aura trahi la confiance des centaines de millions de citoyens qui l’ont élu.
CETA : il est urgent de se faire encore plus entendre !
Comité stratégique de M. FEKL : tuer le temps pour éviter le débat public ? Nous refusons de cautionner une parodie de démocratie.
Communiqué commun Amis de la Terre, Attac France, Confédération Paysanne, Union syndicale Solidaires 16 mars
Le 8 octobre 2014 à l’Assemblée nationale, le Secrétaire d’État chargé du Commerce extérieur Matthias Fekl
annonçait sa volonté d’associer la société civile aux négociations en cours d’accords transatlantiques de libre-échange et d’investissement, reconnaissant qu’ils « [posaient] de nombreuses questions de fond » [4]. Cette ouverture devait se faire dans le cadre d’un comité de suivi stratégique (CSS) ouvert à plusieurs associations et syndicats. Un semestre plus tard, force est de
constater que le compte n’y est pas. Nos organisations ont donc décidé de se retirer de ce comité stratégique et dénoncent une coquille vide créée par le gouvernement dans une parodie de
démocratie.
Mis en place à l’automne dernier, le CSS se voulait un espace de consultation,
d’information et d’écoute des différentes composantes de la « société civile ».
Dans la mesure où des négociations sont en cours, nos organisations ont décidé de participer à ce comité afin d’y porter leurs inquiétudes sur ces négociations et d’être informées de leur avancée
comme des positions portées par le gouvernement français. Une convocation à une nouvelle réunion du CSS le 18 mars vient d’être envoyée par le Secrétaire d’État : aucun document
préparatoire ni information sur les positions du gouvernement ne sont communiqués, et l’ordre du jour proposé est quasiment identique à celui reçu lors de la première convocation… En six mois,
seule une opération de relation publique avec la Commissaire européenne au Commerce Cecilia Malmström a été organisée courant décembre.
Hasard du calendrier ? Cette réunion est enfin convoquée après que nous ayons dénoncé fin février la cacophonie des positions françaises sur le mécanisme d’arbitrage des différends
investisseur-État ou ISDS (suite à la fuite d’un document du Secrétariat général aux affaires européennes envoyé aux euro-députés français) [1]. Alors que le rapporteur social-démocrate Bernd Lange en préconisait l’abandon, à l’instar des citoyens européens [2] comme des
députés et sénateurs français [3], le gouvernement maintient l’ambiguïté et semble davantage enclin à travailler en souterrain pour s’assurer de son
maintien sous une version réformée restant favorable aux investisseurs plutôt qu’à écouter la population. Pour Jean-Michel Coulomb, d’Attac France, « en fait de transparence, nous continuons d’apprendre l’essentiel des positions du gouvernement français à travers des déclarations alambiquées ou des
fuites ».
Nous tirons donc aujourd’hui les conclusions de six mois d’existence de ce
CSS :
Face à l’importance des enjeux posés par ces accords de libre-échange (TAFTA
et CETA notamment) et à la volonté manifeste du gouvernement de ne pas engager de réelle consultation démocratique dans le cadre du CSS, nos organisations ont décidé de quitter ce comité. Elles
refusent de cautionner plus longtemps ce qui n’est qu’un outil de communication du gouvernement, dissimulant la volonté d’imposer ces accords à tout prix. Les enjeux sont suffisamment importants
pour ne pas se contenter d‘un pseudo comité stratégique s’apparentant à l’usage à une mise sous cloche du débat public. Selon Nicolas Roux, des Amis de la Terre , « Derrière une volonté affichée de transparence, ce comité n’est qu’un alibi sans aucun contenu et sans perspective réelle de prise en compte des avis
exprimés par les organisations qui y participent ».
Nous souhaitons œuvrer à la construction d’un débat clair et public, répondant
à l’exigence citoyenne. Réaffirmant notre opposition à tout mécanisme ISDS (aussi bien pour TAFTA que pour CETA) et nos préoccupations en matière de démocratie, de justice sociale, d’agriculture
durable et de transition énergétique, nous sommes demandeurs d’un véritable débat sur un grand média public et de la mise en place d’un cadre de travail adéquat, et ce dans un délai court, avant
que les décisions ne soient prises en coulisse.
[2] Près de 150 000 citoyens européens ont affirmé leur rejet de ce mécanisme lors d’une consultation publique européenne et la
Commission européenne a été amené à reconnaître que seuls les lobbies d’affaire et les grandes compagnies sont majoritairement pour l’ISDS et que toutes les autres catégories économiques et
sociales sont majoritairement contre.
Conférence de Susan George organisée par ATTAC VAR
Le gouvernement français défend l'arbitrage privé au service des multinationales
Communiqué d'ATTAC du 26 février
Ce mardi 24 février, les euro-députés français ont reçu une note de recommandation sur le TAFTA. Elle concerne la
résolution sur l’accord transatlantique qui sera examinée par le Parlement européen dans les semaines à venir [5].
Cette note
fuitée livre des informations inédites sur la position du gouvernement et recommande en particulier de ne pas suivre la position de rejet de l’ISDS du rapporteur
socialiste Bernd Lange.
Le gouvernement français prêt à tout pour sauver
l’ISDS ?
Lors d’une réunion au sommet à Madrid samedi, les
sociaux-démocrates européens se sont accordés pour sanctuariser le système de règlement des différends investisseur-État (ISDS) - en clair : pas de rejet mais des
réformes mineures. Pour parfaire la plaisanterie, le gouvernement français a salué cette nouvelle reculade comme une grande victoire de la diplomatie française. Un
communiqué de la majorité, au titre mensonger [1], illustre ce double discours : critiques de façade du mécanisme
face au rejet largement exprimé dans l’opinion publique [2], mais travail en souterrain pour s’assurer de son maintien dans les négociations. La note communiquée ce mardi aux euro-députés français
confirme ces manœuvres : alors que la résolution étudiée par le Parlement européen penche en faveur d’un rejet du mécanisme, les autorités françaises conseillent
aux parlementaires d’« adopter une approche plus prudente sur ce sujet délicat ». En d’autres termes, le gouvernement demande aux parlementaires d’affaiblir la position, déjà bien timide, du rapporteur
social-démocrate allemand Bernd Lange.
Le gouvernement français appelle également dans cette note à
favoriser un travail plus ambitieux sur la coopération réglementaire, sur laquelle nous avons déjà exprimé de multiples inquiétudes [3].
Enfin, en dépit des ravages causés par la crise financière de 2008,
le gouvernement demande l’inclusion des services financiers dans l’accord transatlantique.
Un décalage effarant entre les actes du gouvernement et les
préoccupations des populations
Ces nouveaux éléments témoignent d’un décalage effarant entre les
actes du gouvernement et les préoccupations des populations, alors que l’Initiative citoyenne européenne (ICE) lancée à l’automne dernier vient de dépasser les
1 500 000 signatures.
Le collectif Stop TAFTA dénonce l’attitude méprisante du
gouvernement français et particulièrement la duplicité et la fausseté du secrétaire d’État au commerce extérieur, Matthias Fekl. Nous réaffirmons notre opposition aux
négociations en cours et appelons à se mobiliser massivement lors de la journée d’action internationale du 18 avril contre les traités des
multinationales [4].
Suite à la réaction de la société civile, Matthias Fekl a alors convoqué la presse et
a, lui aussi, exprimé sa colère. Il a déclaré que la note n’avait été « ni vue ni validée », mais rédigée et envoyée par le
SGAE en dépit des consignes officielles. Dans un entretien à Médiapart, le Secrétaire d’État a expliqué
"[cette note] ne reflète pas la position du gouvernement, que je construis depuis mon
arrivée. J’ai d’ailleurs convoqué dès aujourd’hui dans mon bureau les responsables de ce dysfonctionnement, pour faire en sorte que cela ne se reproduise pas. Une note rectificative sera
diffusée, en temps utile."
Cette affaire met à la fois en lumière des conflits au sein des institutions françaises -
entre administration et gouvernement, et montre bien l’importance de la résolution du Parlement européen. Le texte qui en émergera donnera des indications précieuses sur l’état des positions des
élus de Bruxelles, et sur les grandes lignes de faille que devront utiliser nos campagnes.
Une vidéo pour expliquer un des éléments essentiels dans la stratégie des multinationales pour leur
permettre de décider de nos lois, normes et règlements. Cet élément figure dans de nombreux traités de libre échange comme le TAFTA, le CETA...
Traversée à haut risque à bord du TAFTA
Les multinationales prédatrices et leurs projets de traités, le TAFTA ou Grand Marché Transatlantique, et le CETA (accord
entre l’Union Européenne et le Canada), menacent la démocratie.
Pour la défendre, et la raviver, rien de mieux que de la pratiquer tous ensemble ! Depuis quelques mois, au côté des collectifs locaux Stop TAFTA, des militants et sympathisants d’Attac provoquent de riches
débats citoyens avec leur pièce de théâtre « Traversée à haut risque à bord du TAFTA ».
Dans des saynètes qui se passent à la cantine scolaire, à l’hôpital ou dans les régions exposées à l’exploitation des gaz de
schiste, avec humour et sérieux, ils exposent les enjeux de ces traités mortifères dans un format à la portée de tous.
Le nouveau gouvernement à Athènes s’est toujours méfié du partenariat transatlantique pour le commerce et
l’investissement (TTIP) et compte utiliser sa majorité parlementaire pour faire échouer l’accord commercial entre les États-Unis et l’UE. Un article d’EurActivGrèce.
Après avoir donné de la voix lors du débat sur les sanctions russes, le nouveau gouvernement d’Athènes s’attaque
désormais à l’accord commercial UE-USA, ou TTIP.
Georgios Katrougkalos, ancien eurodéputé influent de Syriza, désormais ministre adjoint pour la réforme
administrative au sein du gouvernement grec de gauche, a déclaré que le nouveau pouvoir de l’État hellénique utiliserait son veto pour faire sombrer l’accord, en tout cas dans sa
forme actuelle.
Juste avant les élections grecques en janvier, Georgios Katrougkalos avait déclaré à EurActiv Grèce
qu’un parlement dominé par Syriza ne ratifierait jamais le TTIP.
Interrogé sur le maintien de cette promesse maintenant que Syriza est au pouvoir, le ministre a répondu :
« Je peux vous assurer qu’un parlement où Syriza détient la majorité ne ratifiera jamais l’accord de
libre-échange. C’est un grand service que l’on rend non seulement au peuple grec mais aussi au peuple européen dans son ensemble. »
Double pouvoir de veto
Syriza, le parti de gauche, n’a peut-être pas la majorité absolue au parlement grec mais son petit partenaire de
coalition semble partager le même point de vue sur l’accord commercial.
Le parti d’Alexis Tsipras, qui a remporté une victoire écrasante lors des élections anticipées du 25 janvier
dernier, a formé une coalition avec les Grecs indépendants, parti anti-austérité de droite déterminé à s’opposer aux lois favorisant les grandes entreprises.
Cette coalition donne au nouveau pouvoir grec un véritable droit de veto sur le TTIP et autres accords soumis à la
ratification des parlements nationaux.
En effet, une fois que le pacte sera négocié – processus qui pourrait prendre plus d’un an – il
sera soumis à un vote unanime du Conseil européen, où chacun des 28 gouvernements nationaux est représenté.
Cela signifie qu’un pays peut faire valoir son droit de veto pour influencer les négociations ou bloquer l’accord
commercial dans son ensemble, une occasion que Syriza n’hésitera pas à saisir.
Même si l’accord passe cette première étape, il sera par la suite soumis à la ratification des parlements des
28 États membres, offrant ainsi une deuxième chance à Syriza d’exercer son véto.
L’État providence menacé
Comme beaucoup de partis de gauche et sociaux-démocrates en Europe, Georgios Katrougkalos a exprimé de vives
inquiétudes quant au mécanisme de règlement des différends entre investisseurs et États, ou RDIE, inclus dans l’accord.
Le mécanisme vise à protéger les investissements à l’étranger des entreprises contre des règles nuisibles ou illégales
dans les pays où elles opèrent. Ce mécanisme donne donc une chance aux entreprises d’engager des poursuites judiciaires contre un État dont la législation a un effet négatif sur leurs
activités économiques.
Georgios Katrougkalos a souligné l’incertitude planant au-dessus des négociations du RDIE, ajoutant au passage
que le mandat de la Commission européenne manquait de clarté.
« Depuis le début, ces négociations manquent de transparence, ce qui est anti-démocratique », s’est-il
indigné.
Selon le nouveau ministre, l’objectif du TTIP n’est pas de réduire les droits de douane, qui sont déjà très bas, mais
plutôt d’ajuster les règles appliquées à d’autres secteurs. « Il contribue à l’élimination de certaines procédures bureaucratiques pour les exportations, ce qui renforce
l’efficacité économique », a-t-il admis.
Le danger, selon lui, réside dans le fait que la plupart des secteurs économiques ont des réglementations différentes
en Europe et aux États-Unis. Pour le ministre, les multinationales cherchent à avoir le moins de barrières réglementaires possible, citant notamment les banques et les sociétés de
courtage qui sont soumises à moins de contrôle aux États-Unis qu’en Europe.
« L’UE n’autorise pas les OGM, offre une bien meilleure protection des données et de meilleurs systèmes de santé
nationaux », a-t-il déclaré, ajoutant que toute consolidation de ces règles « bouleversera la manière dont l’État providence est organisé dans l’UE. »
Les Grecs indépendants sur la même ligne
Les Grecs indépendants, le parti anti-austérité de droite, partenaire de coalition de Syriza, s’oppose également au
TTIP.
Dans un communiqué publié le 4 novembre 2014, le parti, dans l’opposition à cette époque-là, avait déclaré
que l’accord ne serait pas à la hauteur de ses promesses de relancer l’activité économique.
« L’accord est censé stimuler l’économie réelle, mais ses principaux défenseurs sont des banques internationales
et des lobbies », a rappelé Marina Chrysoveloni, porte-parole des Grecs indépendants.
« En d’autres termes, le capital spéculatif sera encore plus libre de circuler […] dans un marché unique immense
qui comptera 800 millions de personnes » a-t-elle conclu.
Du côté de Syriza, Georgios Katrougkalos admet qu’il ne sait pas comment vont se terminer les négociations mais
se dit confiant que l’accord de libre-échange « sera approuvé par le Parlement européen ».
« Les sociaux-démocrates rejettent la clause de règlement des différends entre investisseurs et États mais
semblent accepter la logique de l’accord commercial », a rappelé le ministre adjoint. Selon lui, le Parti populaire européen de centre-droit et les libéraux ADLE « peuvent
compter sur leur majorité au Parlement ».
Bénéfices sociaux économiques du traité de libre échange euro-canadien CETA
par Robert Joumard ATTAC Rhône 28 décembre 2014
Les négociations du projet de traité de libre-échange entre l'Union européenne et le
Canada intitulé « Accord économique et commercial global » (AECG, Ceta en anglais) se sont
closes le 26 septembre dernier. Sa ratification est attendue d'ici mi-2016. Ces négociations se sont déroulées dans le plus grand secret, à l'abri des journalistes et des citoyens, mais en totale
coordination avec les multinationales présentes des deux côtés de l'Atlantique. Le gouvernement du Canada n'a publié le texte du traité que fin septembre en anglais et en français, en format HTML
(12), la version française étant mise depuis en format MS Word (3). L'Union européenne n'a publié que la version anglaise, promettant les traductions dans les autres langues de l'Union, qui ne sont toujours pas disponibles plus de trois mois
plus tard.
Croissance, création d'emplois et hausse des revenus sont les arguments des projets de
traités de libre-échange, et en particulier du projet de traité euro-canadien. Ils seraient la conséquence de l'augmentation des échanges et de l'augmentation des investissements étrangers. Que
disent les nombreuses études disponibles sur ce point ?
Les résultats des quatre études d'impact
Une première étude réalisée par deux chercheurs du gouvernement canadien en 2001 se
concentrait sur l'impact de l'élimination des droits de douane sans prendre en compte l'harmonisation des normes (4).
Elle prévoyait des augmentations de 0,003 à 0,009 % du PIB de l'Union européenne à quinze États membres, de 0,004 à 0,8 % pour les treize pays alors candidats à l'Union (c'est-à-dire la
Turquie et les douze pays devenus membres de 2004 à 2007), et de 0,03 à 0,04 % pour le Canada.
La Commission européenne a par la suite fait faire deux études d'impact du projet de
traité euro-canadien. La première en 2008, dite évaluation conjointe de la Commission européenne et du Gouvernement du Canada (8), a été réalisée par Joseph François de l'Université de Linz en Autriche pour la partie modélisation et Walid Hejazi de l'Université de Toronto. Joseph François est aussi le
principal auteur de l'étude d'impact du traité euro-étasunien(10) mise en avant par
la Commission etréalisée par le CEPR dont J. François est membre. La seconde étude d'impact publiée en 2011
(16) a été menée par des consultants et des
universitaires, notamment de l'Université de Manchester. Les deux études utilisent le même modèle économétrique que l'étude de 2001, qui est aussi utilisé par la plupartdes études d'impact du traité euro-étasunien, et font les mêmes hypothèses : élimination des droits de douane bilatéraux, leur réduction multilatérale conforme aux objectifs en matière agricole du cycle de
négociations de l'Organisation mondiale du commerce de Doha de février 2008 (qui n'ont jamais été adoptés), un taux identique de baisse (de 6 à 10 %) du coût des services. Ces hypothèses apparaissent largement irréalistes.
En terme de produit intérieur brut ou PIB, l'étude de 2008 prévoit après sept ans de
mise en œuvre du traité (de 2007 à 2014) une augmentation d'environ 0,08 % pour l'UE et d'environ 0,77 % pour le Canada. L'étude de 2011 prévoit à long terme des augmentations du PIB
respectivement de 0,02 à 0,03 % et de 0,18 à 0,36 %. Les résultats de ces deux études sont donc assez différents.Dans une version provisoire de leur rapport (15p. 41), les auteurs de l'étude de 2011 notent ces différences
et admettent ne pouvoir les expliquer que partiellement, ce qui est assez étonnant et met en cause la validité de leurs estimations. Cette comparaison a disparu dans le rapport final, ce qui
évite de se poser des questions.
Une quatrième étude de deux chercheurs européens a été publiée en 2010 (17). Elle utilise le même modèle et les mêmes données. Elle donne des résultats similaires à l'étude de 2011 : augmentation des PIB
europunien et canadien respectivement de 0,04 et 0,36 %.
Dans les quatre cas, le gain annoncé est donc dérisoire.
L'étude de 2011 évalue en outre les impacts sociaux et environnementaux. Elle ne prévoit pas
d'impact sur l'emploi et les conditions de travail dans le domaine agro-alimentaire, mais prévoit une intensification de l'agriculture au Canada avec une augmentation des intrants chimiques. Cela
aura des impacts négatifs sur l'utilisation et la qualité des sols et des eaux, la pollution de l'air, la biodiversité et les déchets. Dans l'industrie, l'étude ne prévoit pas d'impact social ou
environnemental significatif. Dans le secteur des services, elle prévoit des création d'emplois mais guère d'impact sur l'environnement.
Dans quelle mesure peut-on faire confiance à ces études d'impact ?
L'économiste Jim Stanford (22)a fait la démonstration que les échanges commerciaux croissent davantage en dehors qu'à l'intérieur des traités de libre-échange signés par le Canada.
Il a analysé lescinq traités de libre-échange les plus anciens du Canada, avec les États-Unis, le Mexique, Israël, le
Chili et le Costa Rica. Résultat ? Les exportations canadiennes vers ces pays ont crû, en moyenne annuelle, moins rapidement que celles vers les pays sans accord (4,8 % contre
5,1 %). De plus, les importations du Canada en provenance de pays libre-échangistes ont crû plus rapidement que celles en provenance des autres pays (8,7 % contre 7,3 %), avec pour
résultat que la balance commerciale du Canada est déficitaire depuis une dizaine d'années. Ce qui fait dire à Stanford que, si le but est d'accroître les exportations et de renforcer la balance
commerciale du Canada, signer des traités de libre-échange n'est vraiment pas la chose à faire.
Pierre Defraigne, ancien directeur de cabinet de Pascal Lamy du temps où celui-ci était
commissaire européen au Commerce, et ancien directeur général adjoint au commerce dans cette même Commission, nie que l'élargissement d'un marché se traduise par un avantage économique
(9) : « Il suffit de voir comment la
création du Marché unique, puis celle de l’euro, n’ont pas vraiment permis aux Européens de progresser dans l’intégration industrielle, de cumuler leurs investissements de recherche pour
rattraper leur retard technologique. Sur ce terrain, on risque de se faire battre à tous les coups parles Américains.
Pourquoi faudrait-il livrer notre marché à des concurrents plus forts ? En outre, la concurrence est très imparfaite. Croyez-vous vraiment que puisse surgir demain un concurrent européen de
Google ou de Yahoo ? »
Ensuite, les quatre principales mesures du projet de traité euro-canadien (élimination
des droits de douane, harmonisation des normes, lois et règlements, protection des investissements, et mise en place de cours de justice privée pour régler les différends des multinationales
envers les États) sont prises, est-il avancé, pour protéger et stimuler les investissements : le préambule du traité « reconnaît que la protection des investissements et des
investisseurs stimule les affaires d’une manière mutuellement avantageuse ».Cela vise à mettre les investisseurs étrangers à l'abri des modifications
des politiques publiques. Ainsi, les investissements étrangers seraient d'autant plus importants et productifs que leur seraient assurés un cadre législatif et judiciaire favorable, continu et
prévisible et une totale liberté de circulation.
Pourtant, de nombreuses études
tendent à démontrer le contraire. L'idée selon laquelle plus un payslibéralise le secteur des investissements –
notammentvia la signature de traités d’investissement,plus il reçoit d'investissements directs étrangersest un mythe. Plusieurs études de la Banque
mondiale(13)et de la Cnuced(7)démontrent que l'introduction de dispositifs de libéralisation et de « protection des investissements » ne favorise pas l'accroissement ou le renforcement des flux
d'investissements directs étrangers. Le développement des infrastructures, l'importance du marché intérieur ou le dynamisme du secteur productif local sont bien plus décisifs.
La Chine et la Malaisie, pourtant connus pour être restrictifs dans l'accueil des investissements
étrangers, en reçoivent beaucoup, alors qu'à l'inverse, bon nombre de pays d'Afrique, pourtant bien plus libéralisés, en reçoivent très peu (1,23).Le Brésil, qui n’est signataire
d’aucun traité bilatéral d’investissement, n’en est pas moins le principal bénéficiaire des investissements étrangers en Amérique du Sud (6,11).
Enfin, vis-à-vis de la modélisation des échanges, du PIB et des emplois, la pertinence
du modèle utilisé par les différentes études apparaît très contestable selon de nombreuses recherches publiées dans les années 2000 et reprises par l'étude très récente d'un chercheur de
l'Université de Tufts aux États-Unis (5). Ce
modèle postule notamment la rationalité parfaite des individus, une information complète des prix, une connaissance commune de la nature des biens, etc., ce qui ne se vérifie pas dans la réalité.
Ces études d'impact semblent donc de purs exercices théoriques sans grand rapport avec la réalité.
L'expérience historique des récents traités de libre-échange
Cela est confirmé par l'épreuve des faits : les gains prévus par modélisation avant la
signature des traités de libre-échange entre les trois États nord-américains (Aléna) et entre les États-Unis et la Corée du Sud n'ont aucun rapport
avec la réalité mesurée après quelques années de mise en œuvre de ces traités, comme on le voit ci-dessous.
Nous avons en effetun laboratoire vivant, réel,
sur vingt ans, qui nous permet d'avoir une idée de l'impact des projets de traités de libre-échange impliquant l’Union européenne :c'est l'Alena (Accord de libre-échange nord-américain entre les États-Unis, le Canada et le Mexique) (2), dont les traités euro-canadien et euro-étasunien sont des copiés-collés. D'après la Fondation autrichienne pour la recherche sur le
développement ÖFSE (19), les onze évaluations
faites avant l'entrée en vigueur du traité prévoyaient un gain net pour les trois parties prenantes du traité, et tout particulièrement pour leMexique et le Canada, avec des croissances de PIB et d'emplois allant jusqu'à 11 %, et des augmentations de salaires allant jusqu'à 16 %. On notera que, comme
pour le projet de traité euro-canadien, les responsables politiques de premier plan ont surinterprété les résultats d'évaluations déjà très optimistes pour vendre le projet.
Or les dix huit évaluations a posteriori
concluent que les impacts sur le bien-être et le PIB sont négligeables. Pour le Mexique, nombre d'études suggèrent même que l'Aléna a eu un impact
négatif sur le PIB, les salaires et la distribution des revenus. Ainsi, bien que Bill Clinton ait promisà l’époque la
création de millions d’emplois et en dépit de l'augmentation des exportations, la concurrence exacerbée et l'importation de produits étrangers ont provoqué la destruction nette de près de
880 000 emplois sur le sol étasunien et de deux millions d’emplois agricoles au Mexique (20,24).
De son côté, le traité de libre échange entre les États-Unis et la Corée du Sud est
entré en vigueur le 15 mars 2012. Il devait d'après la Commission du commerce international des États-Unis (U.S. International Trade Commission)
augmenter les exportations étasuniennes de 9,7 à 10,9 milliards de dollars après plein effet du traité, augmenter les importations de Corée du Sud de 6,4 à 6,9 milliards de dollars et augmenter
le PIB étasunien de 10,1 à 11,9 milliards de dollars (18). D'après l'administration Obama, il devait créer 70 000 emplois aux États-Unis, en négligeant les emplois perdus en raison de l'augmentation des importations coréennes
aux États-Unis (25).
En fait, un an après son entré en vigueur, le traité s'est traduit par une baisse des
exportations étasuniennes de 3,5 milliards de dollars et une augmentation du déficit commercial avec la Corée du Sud de 5,8 milliards de dollars, entraînant une perte de 40 000 emplois aux
États-Unis. Il est peu probable que cette tendance s'inverse à l'avenir (21).
Conclusion
Les traités de libre-échange comme le traité euro-canadien ou le traité euro-étasunien
se traduiront par des transformations politiques, légales et réglementaires de grande ampleur pour les citoyens : cf. une analyse complète des traités de libre-échange et de leurs
implications dans une synthèse récente (14). Les
quatre études d'impact socio-économique du projet de traité entre l'Union européenne et le Canada prévoient des impacts assez différents, mais de toute manière dérisoires, qui ne peuvent
justifier de telles transformations. De plus, ces études semblent très contestables d'un point de vue théorique et surtout d'un point de vue empirique. En effet, les traités de libre-échange sont
de fait dans de nombreux cas très défavorables à la balance commerciale, à l'emploi et au PIB.
Il faut donc s'attendre à ce que les impacts socio-économiques du traité euro-canadien soient, au moins au
sein de l'Union européenne, négatifs, en terme d'emplois et de revenus, voire vis-à-vis de l'environnement.
Il est pour le moins étonnant que des économistes utilisent des modèles théoriques
aussi éloignés de la réalité : ces économistes semblent plus à même de traduire en modèles des aprioris idéologiques que de modéliser le réel. Dans une approche scientifique, les hypothèses
et modèles sont constamment améliorés pour que leurs résultats collent au plus près de la réalité observée. Un modèle qui donnerait des résultats contraires aux observations serait immédiatement
rejeté. Les « sciences » économiques ne suivent pas cette approche et ne sont donc pas des sciences.
Dossier coordonné par Maxime COMBES d' ATTAC et Amélie Canonne d' AITEC
Les politiques de libéralisation du commerce et d’extension des droits
des investisseurs renforcent la division internationale des systèmes productifs, font prédominer le droit des investisseurs sur le droit de l’environnement et la démocratie, et ignorent les
exigences climatiques. En orientant le développement économique vers l’exportation et la recherche de compétitivité externe à tout prix, elles rendent les économies et nos sociétés
ultra-dépendantes des importations et exportations d’énergies fossiles, et dotent les acteurs économiques des instruments pour empêcher la mise en oeuvre de véritables politiques de
transition énergétique. Les négociations entre l’Union européenne et les États-Unis (TAFTA) et entre l’UE et le Canada (CETA) promeuvent un modèle énergétique insoutenable, très fortement
dépendant des infrastructures d’extraction, de transformation et d’acheminement des énergies fossiles, qui anéantit toute ambition de maîtriser le changement climatique.
Satisfaisant les intérêts des multinationales de l’énergie et de
l’industrie, l’extension du libre-échange et de la protection de l’investissement privé s’oppose aux exigences de sobriété, de relocalisation des systèmes productifs, de développement des
énergies renouvelables et de coopération entre les citoyens, les consommateurs et les communautés pour partager et distribuer les ressources existantes. Conclure des accords de l’ampleur de
TAFTA et de CETA réduira presque à néant l’espoir de voir naître « des sociétés plus agréables à vivre, plus conviviales, plus solidaires, plus justes et
plus humaines » [1]. Ainsi combattre TAFTA et CETA, c’est lutter contre le réchauffement
climatique car c’est préserver la possibilité de mettre en œuvre de véritables pratiques et politiques de transition écologique et sociale.
Photo : ATTAC
TAFTA et CETA libéralisent le marché transatlantique de l’énergie
Au prétexte de garantir sa « sécurité
énergétique » et son approvisionnement en énergies fossiles, l’Union européenne cherche à libéraliser le commerce et les investissements transatlantiques en
matière d’énergie et de matières premières. Le mandat de négociations [2] confié à la Commission européenne par les États-membres – qui ne
mentionne pas les défis climatiques – est très clair : la Commission doit « assurer un environnement commercial ouvert, transparent et prévisible en
matière énergétique et à garantir un accès sans restriction et durable aux matières premières ». Et l’ex-Commissaire européen au commerce, Karel de Gucht,
l’avait explicitement confirmé : il souhaitait « permettre aux entreprises européennes d’importer des ressources énergétiques et matières premières des
États-Unis ». Les documents fuités dans la presse américaine en mai et juillet derniers [3] le prouvent incontestablement : l’UE souhaite la fin des restrictions
américaines à l’exportation de gaz naturel et de pétrole brut. Une série de dispositions prévoit même de faciliter les investissements et l’octroi de licences de prospection, d’exploration et de
production d’hydrocarbures aux entreprises étrangères des deux côtés de l’Atlantique.
TAFTA et CETA encouragent l’exploitation d’hydrocarbures de schiste et de sables
bitumineux
La France et l’Allemagne ont explicitement appuyé cette approche, arguant, crise
diplomatique avec Moscou oblige, de l’urgence de substituer de nouvelles sources d’importation au gaz russe, mais jurant que la compensation serait à somme nulle. Si les attentes de l’UE étaient
acceptées, l’industrie pétrolière et gazière nord-américaine serait encouragée à étendre la frontière d’extraction du pétrole issu des sables bitumineux dans le nord-est canadien et l’usage de la
fracturation hydraulique pour accroître la production d’hydrocarbures de schiste. Soit deux des sources d’hydrocarbures les plus polluantes et dévastatrices pour l’environnement et les
populations avoisinantes que l’on connaisse sur la planète. Pour être acheminés de l’autre côté de l’Atlantique, ce gaz et ce pétrole nécessiteraient des investissements colossaux – plusieurs
centaines de milliards de dollars – dans la construction de nouveaux pipelines, raffineries et usines de liquéfaction et regazéification des deux côtés de l’Atlantique.
Pourtant, le gaz de schiste n’est pas une énergie de transition
Souvent, les responsables politiques européens et américains se retranchent
derrière l’argument selon lequel le gaz de schiste serait moins émetteur de gaz à effets de serre que le pétrole ou le charbon lors de sa combustion. Il serait donc possible d’en faire
« une énergie de transition » le temps d’abandonner le charbon. Cet argument est pourtant irrecevable pour trois raisons. Des
études [4] montrent que le cycle complet de production du gaz de schiste – de
l’extraction à la combustion – serait potentiellement plus émetteur de gaz à effet de serre que le charbon, surtout s’il est destiné à l’exportation, qui exige liquéfaction (pour le transport)
puis regazéification. Aux regards des exigences climatiques rappelées avec force par le GIEC, et alors que l’UE s’affirme à la pointe de la lutte contre le changement climatique, est-il encore
acceptable qu’elle accepte de substituer une énergie fossile à une autre ? L’urgence est au contraire à réduire en valeur absolue la consommation d’énergies
fossiles, quelles qu’elles soient. Enfin, les lourds investissements consacrés à la production d’hydrocarbures de schiste, pour des projets que les populations refusent, ne le seront pas pour des
politiques de transition énergétique.
TAFTA et CETA sabotent déjà la lutte contre les dérèglements climatiques !
Avec CETA et TAFTA, les normes visant à encadrer et/ou réduire l’importation et
la consommation d’énergies fossiles ne sont pas les bienvenues et sont perçues comme des fardeaux réglementaires à supprimer. Fin septembre, la Commission européenne et le Canada ont annoncé
avoir finalisé leurs négociations commerciales. Quelques jours plus tard, l’Union européenne renonçait [5] à restreindre l’importation du pétrole issu des sables bitumineux. Rien d’un hasard de calendrier
bien au contraire : pour obtenir ce résultat, Stephen Harper, le Premier Ministre canadien, allié aux multinationales du pétrole, a multiplié, des mois durant, les pressions
diplomatiques [6] auprès des responsables politiques européens afin que la Directive européenne sur la qualité
des carburants ne pénalise pas spécifiquement les entreprises qui produisent, commercialisent et/ou utilisent du pétrole canadien. Depuis, le gouvernement français a jugé que cet accord était un
« bon accord » et, le 2 novembre dernier, le jour où le GIEC présentait la synthèse de ses travaux, François Hollande s’est rendu en Alberta pour encourager les investissements français dans les sables
bitumineux... L’UE et la France encouragent de cette façon le Canada dans sa logique déplorable : Ottawa a déjà annoncé sa sortie du Protocole de Kyoto et a renoncé à atteindre ses objectifs
de réduction d’émissions. Quant aux États-Unis, leur annonce récente non contraignante (réduction de 26 à 28 % de leurs émissions d’ici 2025 par rapport au niveau
de 2005) est bien moins spectaculaire une fois ramenée au niveau de 1990 et à un chiffre annuel : -0,43%. On perçoit mieux la modestie de cet objectif lorsque l’on apprécie le boom de
l’exploitation et du commerce des hydrocarbures de schiste dans le pays et vers l’Europe.
TAFTA va accroître les émissions de gaz à effets de serre
L’étude d’impact commanditée par la Commission européenne reconnaît qu’une
libéralisation accrue des échanges transatlantiques générerait une hausse des émissions de gaz à effets de serre de quatre à onze milles tonnes de CO2 par an. Cette hausse, même relativement
limitée, n’est-elle pas contraire aux exigences climatiques qui imposent de mettre en œuvre des politiques réduisant drastiquement les émissions de GES ? Plutôt
qu’investir dans des programmes de sobriété et d’efficacité énergétique en mesure d’engager l’économie européenne dans une ère post-fossile, TAFTA contribuerait à maintenir et accroître une très
forte dépendance aux énergies fossiles en Europe, qui est déjà de 60 % pour le gaz et de 85 % pour le pétrole. Plus généralement,
les accords commerciaux contribuent à accroître les échanges internationaux au détriment de politiques de relocalisation des circuits de production et de consommation. L’UE souhaite en
l’occurrence que TAFTA et CETA s’inscrivent dans un projet économique global, dans lequel la multiplication des accords de commerce de nouvelle génération la hissera au premier rang mondial des
exportateurs. Ainsi, alors que la contribution du commerce de marchandises aux dérèglements climatiques est évaluée à 10% des émissions mondiales, en constante augmentation, elle pratique la
fuite en avant.
Le droit des investisseurs contre le climat
En faisant primer le droit commercial sur les exigences écologiques et en
étendant toujours plus les droits des investisseurs face aux collectivités publiques, les politiques de libéralisation du commerce et des investissements affaiblissent considérablement la
perspective de voir déboucher des politiques qui contraindront les activités des multinationales extractives et qui organiseront une véritable transition écologique. Le très controversé mécanisme
de règlement des différends investisseur – État fragilisera toute une série de réglementations écologiques dont l’Union européenne, ses pays membres ou collectivités locales déjà existantes, et
aura un effet de dissuasion à l’égard de ces derniers lorsqu’ils envisageront des législations futures. C’est ce type de disposition, inclus dans CETA et prévu dans TAFTA, qui permet à
l’entreprise Lone Pine Resources de poursuivre le Canada pour le moratoire de la province de Québec sur la fracturation hydraulique [7]. C’est également via ce dispositif, déjà compris dans un certain nombre d’accords bilatéraux
d’investissement, que l’entreprise canadienne Gabriel Resources menace d’attaquer la Roumanie parce qu’elle a déclaré envisager d’écouter les habitants de la communauté de Rosia Montana et de
limiter l’exploitation de la mine d’or locale. Dans ces dispositifs, nul État ni collectivité publique ne peut en revanche poursuivre une entreprise qui n’accepterait pas de se soumettre aux
réglementation environnementales publiques existantes ; celles-ci ont le monopole de la force
de contrainte et de sanction que procure le régime international de l’investissement codifié dans CETA et dans TAFTA. Engager des politiques et des lois efficaces pour enrayer durablement les
dérèglements climatiques appelle donc, au minimum, d’admettre une certaine hiérarchie des urgences et des légitimités, et de soumettre les droits du commerce et des investisseurs au droit
international des hommes et de l’environnement.
Le droit commercial contre la transition énergétique
Organiser la transition énergétique exige de promouvoir des énergies
renouvelables à l’échelle des territoires, dans une logique de coopération et de partage des connaissances et des savoir-faire, qui suppose des modes de soutien et de gestion associant les
collectivités locales, les consommateurs et les PME ou coopératives de production. Or ces accords de libre-échange réduiront très sensiblement la capacité des États et des collectivités locales à
accompagner ces mutations. Selon le texte final de l’accord UE-Canada, qui préfigure largement le contenu du TAFTA, les collectivités publiques - États, régions, municipalités, UE en tant que
telle... - ne pourront ni adopter ni maintenir des mesures imposant un minimum de contenu, de production ou de consommation locale à une entreprise investissant sur leur territoire, ni exiger que
celle-ci s’associe à des entrepreneurs locaux ou nationaux, ni obliger la dite entreprise à transmettre son savoir-faire localement, notamment via l’ouverture des droits de propriété
intellectuelle qu’elle détient sur une technologie ou un mode opératoire. Il sera également impossible d’introduire des formes de subventions préférentielles à des acteurs économiques locaux au
détriment d’entreprises dont les activités seraient exclusivement exportatrices. En effet de tels instruments politiques sont considérés par le droit du commerce et de l’investissement comme des
distorsions à la libre-concurrence ou comme des restrictions à la liberté des investisseurs étrangers. Des précédents attestent du risque effectif pour la puissance publique puisque des mesures
de ce type ont déjà été contestées et invalidées. Le programme de développement des énergies renouvelables en Ontario (Canada) a du être abandonné sous la pression du Japon et de l’Union
européenne. Les États-Unis ont également attaqué l’Inde devant l’Organe de règlement des différends de l’OMC en raison de son programme d’appui à la filière solaire nationale, qui obligeait les
opérateurs étrangers à acheter les panneaux solaires à des entreprises locales. Ce sont pourtant des flexibilités indispensables pour qu’une collectivité locale ou qu’un État puissent soutenir le
déploiement des renouvelables sur tous les territoires. Ces critères de localité et de qualité sont également de puissants outils pour relocaliser des emplois et des activités à travers la
promotion de produits et de compétences locales, et l’utilisation des meilleures technologies disponibles.
Le commerce international fait disparaître des émissions de CO2 !
A travers le commerce international, ce sont les émissions incorporées aux biens
et services échangés qui circulent d’un pays à l’autre. Ces émissions, fruit de la production de ces biens et services et des consommations intermédiaires qu’ils nécessitent, représenteraient,
selon plusieurs études [8], près de 28 % des émissions mondiales
de CO2 alors qu’en 1990, ce chiffre n’était que de 18%. En longue période, le commerce international ayant augmenté plus vite que le PIB, les émissions qui sont incorporées aux biens échangés
augmentent plus vite que les émissions globales : + 4,3 % par an en moyenne sur 2000 – 2008 contre + 3,4 % pour les
émissions globales [9]. Tout comme certains pays exportent plus de biens qu’ils n’en
importent, disposant ainsi d’une balance commerciale positive, certains pays, au niveau des émissions, sont exportateurs nets d’émission quand d’autres en sont importateurs nets. Les pays les
plus riches sont essentiellement des pays importateurs nets d’émission. La Chine est exportatrice nette d’émissions, à hauteur de 27 % de ses émissions totales.
La comptabilisation de ces émissions importées ne serait pas importante si elle ne changeait pas totalement la façon dont évolue les émissions d’un grand nombre de pays. Ainsi, en France, les
émissions ont officiellement diminué de 7 % entre 2000 et 2010 (- 6% pour l’UE). Mais si l’on tient compte des émissions incorporées dans les importations et
exportations, on calcule que les émissions de CO2 ont augmenté de 15 % sur la période (+ 9 % pour l’UE). Ainsi, à travers le
commerce international, c’est l’empreinte carbone de toute une série de pays qui tend à se réduire et à devenir invisibles
pour s’agréger à celle d’autres populations, généralement plus pauvres et bien moins émettrices de gaz à effets de serre. Est ainsi dissimulée dans le commerce international une part
importante des émissions liées aux choix de consommation des populations des pays riches.
Conclusion
TAFTA et CETA, et plus généralement les politiques de libéralisation des échanges et de
l’investissement, représentent des incitations - institutionnelles, juridiques et économiques - nouvelles à l’expansion du commerce transatlantique des énergies fossiles. La dépendance des
économies européennes aux énergies fossiles n’en sera que renforcée et l’exploitation des hydrocarbures non conventionnels, des deux côtés de l’Atlantique, encouragée. Cette perspective est-elle
bien compatible avec les objectifs de réduction de 30 % de la consommation de ressources fossiles d’ici 2030 et de division par quatre des émissions de GES d’ici
2050 comme prévu par le premier article du projet de loi sur la transition énergétique voté à l’automne 2014 ? Si François Hollande est réellement convaincu que
le sort de l’humanité se joue avec le réchauffement climatique, comme il l’a récemment affirmé à plusieurs reprises, alors pourquoi ne pas conditionner tout nouvel accord de libéralisation des
échanges et d’investissement au respect des responsabilités climatiques des pays les plus émetteurs et les plus pollueurs ?
Vous pouvez lire le compte-rendu de la réunion du collectif national unitaire qui s'est tenue le 25 novembre
Les conditions de la participation d'ATTAC France au "comité de suivi stratégique" du traité transatlantique (TAFTA)
Attac France prend acte de la volonté d’ouverture et de transparence affichée par le secrétaire d’État au
commerce, avec sa proposition de création du « comité de suivi stratégique » des négociations en cours sur les accords de
libre-échange.
Attac réaffirme son opposition au dogme du libre-échange qui guide les négociations
commerciales internationales et les politiques d’investissement. Dans la mesure où des négociations sont en cours, Attac, en tant qu’association citoyenne, souhaite pouvoir participer au
processus ouvert avec le comité de suivi stratégique, afin d’être informée de l’avancée des négociations et des propositions françaises.
Notre association y participera au nom de l’expertise citoyenne qu’elle a construite
depuis près de 15 ans de travail sur les traités de libre-échange. Attac rappelle qu’elle s’oppose notamment à toute forme de mécanisme de règlement des différends investisseurs-États et de
coopération réglementaire aussi bien dans le TAFA que dans le CETA car ils attentent aux principes fondamentaux de la démocratie.
Dans le cadre de ce comité stratégique, Attac demande une publication régulière des
positions de négociations de la France et de l’Union européenne (UE) ainsi que la position de la France dans la construction de la position de l’UE. Attac demande également la publication de
toutes les consultations du gouvernement, de toutes les composantes de la « société civile », y compris les
consultations des entreprises et fédérations professionnelles.
Au cas où ces attentes ne seraient pas honorées, Attac se réserve la possibilité de se
retirer du dit comité et annonce qu’elle fera connaître les raisons de cette position publiquement.
CETA : où en est-on ?
Le 26 septembre 2014, à Ottawa, la Commission Européenne et le Canada ont validé la fin des négociations sur l'accord
de libre échange Union Européenne-Canada (CETA). Notre combat n'en est pas terminé pour autant.
La mise en oeuvre du CETA aurait des conséquences dramatiques sur :
la démocratie
notre agriculture paysanne
la relocalisation des productions industrielles
la possibilité de réaliser une transition énergétique
l'action contre le changement climatique que les derniers rapports du GIEC rendent plus nécessaire que jamais.
notre droit du travail
nos droits sociaux
nos normes environnementales, alimentaires, sanitaires
le développement culturel
Rappelons que les négociations sur le CETA avaient commencé en 2009 et étaient prévues pour durer initialement 2 ans.
Le processus de ratification du CETA par les Etats Européens peut durer plusieurs mois voire plusieurs années.
Tout d'abord, le texte doit être traduit dans les 24 langues officielles de l'Union Européenne. Il doit être mis sous forme
légale. Ensuite, le Comité des Représentants Permanents (COREPER) (1) doit vérifier la conformité du texte signé avec le mandat donné à la Commission européenne. Le texte de l'accord doit passer
devant un comité de juristes pour savoir si l'accord va au delà du commerce et de l'investissement c'est à dire s'il est mixte. Il passera alors devant le Conseil Européen, soit au niveau des
Ministres compétents de chaque Etat membre soit au niveau des chefs d'état et de gouvernement. Le Conseil européen se prononcera à la majorité qualifiée (2). Le Parlement Européen devra le
ratifié s'il a été adopté par le Conseil européen. Le Parlement européen ne peut pas modifier le contenu du traité. il ne peut que l'accepter dans sa globalité ou le rejeter. Si l'accord a été
déclaré mixte, il devra être ratifié aux niveaux des états selon leurs propres règles..
Nous avons déjà réussi par le passé à mettre un terme aux vélléités de nos dirigeants sur l'AMI en 1998. L'Accord
commercial sur la contrefaçon (ACTA) qui porte sur le renforcement des droits de propriété intellectuelle négocié entre 2006 et 2010 par une quarantaine de pays voit sa ratification suspendue
dans de nombreux pays. Nous ferons aussi tomber le CETA et le TAFTA.
(1) Le COREPER : Il est présidé par l'état membre qui assure la présidence du Conseil. Il est composé de représentants des
états membres qui ont rang d'ambassadeurs. Il prépare les travaux du Conseil de l'Union Européenne.
(2)Selon le traité de Lisbonne, la
nouvelle majorité qualifiée en vigueur depuis le 1er novemebre 2014 correspond au moins à 55% des membres du Conseil comprenant au moins 15 d’entre eux et représentant au moins 65% de la
population européenne. Une minorité de blocage peut être constituée par au moins 4 membres du Conseil.
Pour une analyse plus détaillée du CETA, vous pouvez télécharger et lire le document ci-dessus. Cette analyse a été faite par ATTAC et l'AITEC à partir du texte édité le 5 septembre par le gouvernement canadien. Ce texte comporte pas moins de 1728 pages.
Le jeudi 11 septembre 2014, la commission européenne a rejeté la proposition d'Initiative Citoyenne Européenne (1)
visant à obtenir des Etats membres de l'UE qu'ils ne concluent pas les accords de libre échange UE-EU (TAFTA) et UE-Canada (CETA). Cette proposition avait été déposée par plus de 230 mouvements
citoyens de 21 pays de l'Union Européenne.
Face à ce refus, ces mouvements ont décidé d'organiser eux-mêmes cette initiative citoyenne européenne.
Pour prendre connaissance des termes de cette initiative
auto-organisée et la signer, il vous suffit de cliquer ici. Au 18 novembre 2014, plus de 900 000 citoyens l'ont déjà signé au sein de l'Union Européenne. La France n'a pas encore rempli le nombre minimum que
les organisateurs lui avaient fixé. Alors à vos souris !
(1) Qu'est ce qu'uneInitiative Citoyenne Européenne (ICE) ?
L'initiative citoyenne européenne a été introduite dans l'article du Traité de l'Union Européenne modifié par le
traité de Lisbonne. Le règlement relatif à l'ICE est applicable depuis le 1er avril 2012.
Selon le site de l'Union Européenne, l'initiative
citoyenne européenne doit permettre à un million de citoyens de l'UE de participer directement à l'élaboration des politiques européennes, en invitant la
Commission européenne à présenter une proposition législative.
Pour lancer une initiative citoyenne, il faut créer un «comité des citoyens» composé d'au moins 7
citoyens de l'UE résidant dans au moins 7 États membres différents.
Les membres du comité doivent avoir l'âge de voter* aux élections du Parlement européen (c'est-à-dire
18 ans, sauf en Autriche, où l'âge requis est de 16 ans).
Les initiatives citoyennes ne peuvent pas être gérées par des organisations. Celles-ci peuvent toutefois promouvoir ou
soutenir des initiatives, à condition de le faire en toute transparence.
Le comité des citoyens doit tout d'abord enregistrer son initiative sur le site internet dédié avant de commencer à
recueillir les déclarations de soutien auprès des citoyens. Une fois l'enregistrement confirmé, les organisateurs disposent d'un an pour recueillir les signatures.
* Les citoyens ne doivent pas être inscrits sur les listes électorales. Il suffit qu'ils aient atteint l'âge requis pour
voter.
Pour que l'ICE puisse éventuellement prise en compte par la Commission, un nombre minimum de signataires est éxigé
par pays .Pour la France, 55500 est le minimum exigé depuis le 1 juillet 2014.
LES OBJECTIFS DE CES TRAITES DE LIBRE ECHANGE
Des le début des années 90, des accords de libre échange ont été signés de façon bilatérale ou
multilatérale entre des Etats. Ces accords visaient à obtenir une plus grande libéralisation des échanges entre les parties concernées ce qui se traduisait de fait par une dérégulation toujours
plus croissante au profit des transnationales et une baisse voir disparition des droits de douane.
En 1995, la création de l'Organisation Mondiale du Commerce a été un pas supplémentaire dans cette volonté de
libéralisation et de dérégulation du commerce. En se dotant de son propre tribunal au travers de l'Organe de Réglement des Différents (ORD), l'OMC se donnait une puissance d'action jusqu'alors
inégalée. Mais cela ne suffisait pas aux dirigeants des multinationales. Ils devaient encore passer par l'intermédiaire d'un état pour pouvoir faire condamner un autre état. Ce qui leur est
insupportable. En février 1999, David Rckeffeler ne déclarait-il pas à Newsweek : « Quelque chose me semble devoir remplacer les gouvernements et le pouvoir privé me semble être l'entité
adéquate ».
Devant l'échec du cycle actuel (cycle de Doha) des négociations au sein de l'OMC, on assiste à une volonté de contournement
de l'OMC de la part des transnationales occidentales. Elles sont aidées en cela par les gouvernements libéraux et sociaux-libéraux en place dans la plupart des pays.
Au travers du CETA, du TAFTA, de l'ALENA, du TPP (qui concerne des pays du Pacifique) et de l'Accord que tente de
négocier les Etats-Unis avec des pays d'Amérique latine, ces transnationales occidentales espèrent imposer leur conception ultralibérale du commerce et des investissements. Elles n'ont cure des
conséquences désastreuses en termes d'emploi (notamment agricoles) et d'environnement pourvu qu'elles fassent du profits et que leurs actionnaires touchent des dividendes
élevés.
LES REGLEMENTS DES DIFFERENTS INVESTISSEURS -
ETATS
Dans les différents traités de libre échange comme le TAFTA ou le CETA, des articles prévoient la
méthode de règlements des différents pouvant intervenir entre les investisseurs et les états. Les transnationales souhaitent éviter d'avoir à passer devant les tribunaux nationaux et préfèrent
que les différents soient traités devant des tribunaux d'arbitrage privés.
Ce sont ces tribunaux privés que les accords de libre-échange reconnaissent. Les transnationales
peuvent alors traduire des états ou des collectivités territoriales devant ces juridictions privées. L'inverse n'est pas vrai. Il n'y a aucun débat contradictoire. Chaque partie présente son
point de vue. Il n'y a pas de d'appel possible des décisions.
Lorsque les transnationales considèrent que leurs investissements ou leurs possibilités d'investissements sont
empêchés ou mis en danger, elles n'hésitent pas à saisir ces juridictions. Il en est de même si elles jugent que le principe de concurrence libre et non faussée est bafoué par une loi, un
règlement ou une décision prise par un état ou une collectivité territoriale.
Les frais judiciaires sont lourds ' environ
800 millions d'euros par procès, les sommes demandées par les transnationales élevées. Les états et collectivités sont donc dissuadés de prendre des décisions qui pourraient leur valoir de tels procès. Une commune réfléchira à deux fois avant d'intégrer au cahier des charges d'un appel
d'offres pour la fourniture des cantines scolaires une clause exigeant un pourcentage de produits locaux ou bio.
Avec ces tribunaux privés, les
transnationales peuvent imposer leurs conceptions des normes sociales, environnementales, sanitaires, phytosanitaires. Elles imposent leurs visions du droit du travail, de la protection
sociale, du développement économique. La justice privée devient supérieure aux justices nationales et européenne. C'est à une forme de coup d'état à laquelle nous assistons.
Depuis 2000, les affaires soumises aux tribunaux privés ont été multipliées par 10.
Quelques exemples de condamnations devant de tels tribunaux privés :
Philipps Morris a fait condamner l'Uruguay à 1,5 milliards d'euros pour avoir voulu imposer, sur les paquets de tabac, un
avertissement dénonçant ses dangers.
L'Equateur s'est vu condamné à verser l'équivalent de 2 milliards d'euros à Occidental Petroleum.
Des procès à venir :
Lone Pine Resources Inc. demande 250 millions de dollars de compensation au gouvernement québécois pour l'instauration d'un
moratoire sur l'utilisation de la fracturation hydraulique dans la vallée du saint Laurent.
Le constructeur suédois de centrales électriques Vaterfall attaque l'Allemagne et lui réclame 3,7 milliards d'euros de
dommages et intérêts après la fermeture de deux de ses centrales suite à la décision de ce pays de sortir du nucléaire.
Schuepach réclame un milliard d'euros d'indemnisation à l'état français à la suit de l'abrogation de ses permis sur
l'exploitation des gaz de schiste. Elle chiffre ses dommages en incluant les bénéfices qu'elle escomptait tirer de 50 ans d'exploitation. Si le TAFTA devait entrer en vigueur cette
multinationale états-uniennes pourrait gagner son procès devant le tribunal privé prévu dans le TAFTA.
LE FORUM DE COOPERATION REGLEMENTAIRE
Dans le CETA comme dans le TAFTA,
il est prévu de mettre en place une structure institutionnelle en vue de garantir un suivi efficace des engagements déroulant de l'accord, ainsi que de promouvoir la réalisation progressive des
régimes réglementaires. Cette structure est désigné dans le CETA sous le nom de Forum de coopération réglementaire.
Le danger vient de ce que dans le texte du CETA finalisé
le 26 septembre entre l'Union Européenne et le Canada, le flou le plus complet entoure cette structure. Qui la composera ? Qui désignera ses membres ? Y aura-t-il un contrôle démocratique
de cette institution ? Si oui, qui effectuera ce contrôle ? Ses décisions devront-elles être obligatoirement appliquées par les parties prenantes de l'Accord ou ne seront-elles que des
recommandations? Dans le mandat de négociation de la Commission Européenne pour le TAFTA, le flou est là aussi total en ce qui concerne cette structure institutionnelle (art43 du
mandat).
Or cette structure peut devenir une arme
redoutable au profit des transnationales.Elle peut leur permettre d'imposer des normes, lois, règlements aux Etats-Unis, aux états membres de l'Union Européenne et aux
collectivités territoriales de ces états au détriment des citoyen-ne-s. Elle peut ainsi leur permettre de poursuivre leur volonté de libéralisation et de dérégulation
maximale.
Les dangers du TAFTA
Le 4 juillet 2014, Frédéric VIALE, membre de la la commission Europe d'ATTAC-FRANCE, chargé des questions de commerce
international est venu débattre des traités de libre échange entre l'Union Européenne et les Etats-Unis (TAFTA) avec plus de 80 personnes.
L'ALENA est le accord de libre échange entre les Etats-Unis, le Canada et le Mexique. Après 20 ans de mise en oeuvre, des organisations états-uniennes, canadiennes et américaines en ont tiré le bilan. Elles demandent dans une déclaration commune une renégociation de cet accord qui s'avère désastreux notamment en termes d'emplois